Broken

Lors de l'arrivée de Gabrielle, Aerie avait profité de la distraction de Lilith pour foncer jusqu'à l'arbre, se tenant les côtes tout en grimaçant de douleur.
Passant derrière l'estrade, elle s'était effondrée sur le tronc de l'arbre qui l'avait lentement absorbée tandis qu'elle se battait contre Morphée.
Deux jours étaient passés depuis et l'arbre la recracha lentement sur la place déserte.
Elle avait souffert pendant tout ce temps, mais avait été dans un état stable, en symbiose avec l'arbre. Seulement maintenant, elle allait devoir rentrer chez elle.

Courbée sous le poids de la douleur, les yeux troubles, elle avançait presque à tâtons. Arrivée à l'extrémité de la place, elle se rendit compte qu'elle n'arriverait jamais à l'allée des loups, quartier le plus loin du village. Essayant de réunir les deux neurones qui n'hurlaient pas de douleur, elle essaya de se rappeler si elle avait une connaissance proche d'ici.

Andréas. Priant pour qu'il ne soit pas rond (même si ce n'était que le matin), elle se dirigea lentement vers l'appartement de l'humain.
Après quelques minutes d'une marche incroyablement douloureuse, elle arriva devant le bâtiment et se rendit compte d'une chose : Il y avait des escaliers jusqu'à chez lui.

Réunissant tout son courage, elle commença à grimper les marches, grognant de douleur à chaque pas. Aerie priait pour que ses jambes ne la lâchent pas, étant donné qu'elle ne pouvait pas agripper à la rampe avec son épaule démise. Au sommet de l'escalier, la vision de la fée se troubla une fois de plus et elle crut pendant un instant que sa fin allait arriver à grand renfort d'une chute dans l'escalier.
Mais elle tint bon et s'orienta vers l'appartement d'Andréas, s'appuyant contre le mur sans lequel elle aurait déjà été par terre.

Enfin, elle se trouva devant sa porte. N'ayant pas la force de toquer, elle leva sa main tremblante vers la sonnette. Au moment même où la sonnerie retentit de l'autre côté de la porte, un éclair de douleur traversa Aerie qui sombra dans l'inconscience.

Dans sa chute, elle s'éclata l'arcade contre la poignée de la porte.

Broken

Aerie s'éveilla doucement. Elle était dans un lit, nue sous son peignoir. Elle tenta de bouger et la douleur de toutes ses blessures fusa en même temps. Étouffant un cri de douleur, elle retomba dans les limbes.

Et ce fût Lotus qui prit sa place. L'absence de son éternel sourire mauvais sur son visage faisait plutôt peur. Elle se tourna vers Andréas tout en attrapant son épaule et lui dit alors :

"Je m'occupe de l'épaule, occupe toi du reste."

Et elle se remit l'épaule sans aucun signe de douleur et dans un bruit à vous retourner l'estomac. La fée noire reposa la tête sur l'oreiller et sembla s'endormir à nouveau.
Quelques minutes plus tard, Aerie s'éveilla à son tour. Elle avait la tête qui tournait et les pensées fortement embrumées sous la douleur ambiante. Elle tendit les bras vers Andréas, comme si elle le voulait près de lui. Quand il s'approcha, elle le prit dans ses bras et tout en le serrant très doucement et lui souffla difficilement à l'oreille :

"Merci."

Elle se rendormit immédiatement. Et se réveilla plusieurs heures après; Andréas avait disparu de son champ de vision, mais une odeur appétissante emplissait ses narines. Manifestement, il avait fait la cuisine et était bien meilleur qu'elle. Attendant qu'il revienne auprès d'elle, elle contempla ce qu'elle pouvait voir de la pièce sans bouger. Il y avait des papiers partout et de nombreuses tasses de café empilées. Elle aurait volontiers voulu lire le travail d'Andréas, mais elle était incapable de bouger sans souffrir le martyr.
Alors qu'elle tentait de discerner le contenu d'une page posée non loin d'elle, il arriva auprès d'elle avec une assiette et un air fortement inquiet. Elle avait beau avoir l'air très mal en point, elle ne souffrait pas si elle s'abstenait totalement de bouger.

"Ne t'inquiètes pas va, je vais survivre, fit-elle avec un sourire. Tu veux bien m'aider à me relever un peu pour que je puisse manger?"

Il la souleva délicatement et lui posa la tête contre le bord du lit. Elle étouffa des grognements de douleurs pendant toute l'opération mais se retrouva haletante pour un bon moment après. Mangeant petit bout par petit bout, elle finit lentement mais sûrement son assiette.

"C'était divin, merci. Bon, je suppose que tu as des questions, mais moi d'abord fit-elle avec un sourire espiègle. Comment ça s'est passé pour toi après la nuit?"

C'est à ce moment précis que son peignoir décida de s'ouvrir largement sur le devant sans qu'elle puisse faire quoi que ce soit.

La semaine allait être TRÈS longue.

Broken

La douche. Ô moment tant redouté...
Heureusement, la douleur ne lui laissait pas se concentrer sur l'instant, elle aurait sûrement fondu de gêne sinon. Elle sentait bien qu'Andréas prenait un malin plaisir à la taquiner, repassant plusieurs fois à des endroits bien gênants. Si ces mains avaient été en état de fonctionner, elle l'aurait frappé. Ou au moins réprimandé. Bon non, après tout c'était un juste retour des choses, vu qu'il avait dû en subir autant chez elle. Moui, mais ça lui avait bien fait plaisir à lui...
Coupant net ces réflexions, l'humain l'aida non sans mal à enfiler ses sous-vêtements ainsi que des vêtements à lui et la posa sur le lit.
Puis, il lui demanda où elle était passée pendant tout ce temps.

"Et bien, quand tu t'es évanoui, j'ai essayé de te protéger contre les vampires autour de toi et grâce aux pouvoirs de Lotus - me demande pas comme j'ai fait, je n'en ai pas la moindre idée - j'ai réussi à créer un cocon autour de toi. Mais là, on m'a envoyé balader contre les armoires en fer du fond et je me suis cassée des côtes. Y en a un qui m'a suivi, donc j'ai couru au premier étage et j'ai été forcée de sauter du premier étage pour sauver ma peau. Sauf que évidemment, je me suis mal rattrapée et je me suis démise l'épaule et aggravée l'état de mes côtes. Du coup, j'avais plus trop le choix et j'ai essayé de me diriger vers l'arbre au centre de la place. J'ai profité de la distraction qu'a apporté Gabrielle et j'ai foncé vers l'arbre, créant une symbiose qui m'a tenu en vie pendant ces deux jours."

Aerie eut du mal à retrouver son souffle après le long monologue. Elle ne pouvait inspirer que des quantités mineures d'air, sans quoi elle souffrait le martyr. La fée dû faire une pause de plusieurs minutes avant de pouvoir reprendre, les larmes aux yeux à cause de la douleur.

"Qu'est ce qui s'est passé ensuite? Tout le monde va bien?"

Elle attendit la réponse d'Andréas en essayant de ne pas pleurer, mais sans grand succès. Elle se trouvait pathétique, mais elle avait l'impression de s'être fait briser tous les os au marteau et semblait à court d'énergie, comme si le cocon qu'elle avait créé pendant la nuit lui avait pompé toute son énergie.

Dans un geste extrêmement douloureux, elle agrippa Andréas pour se serrer contre lui. Heureusement qu'il était là; elle n'aurait jamais réussi à survivre toute seule.

Broken

Lotus s'éveille. Andréas n'a pas bougé depuis la demi-heure où ils se sont endormis côte à côte. En temps normal, elle lui aurait sauté dessus - mais là, elle n'était vraiment pas d'humeur. Se levant difficilement sans ménager Andréas tout en maudissant son manque d'énergie, elle se dirigea vers la porte de l'appartement. L'humain - bien que réveillé - ne disait rien, ce dont elle se surprit à le remercier intérieurement. Un simple mot de sa bouche et elle aurait dû le tuer, ce qui aurait été désagréable dans son état. La fée noire vola le manteau d'Andréas et partit.

Une heure plus tard, elle fût de retour, son humeur massacrante envolée et marchant avec moins de difficulté. Ses pieds étaient maculés de terre et elle dégageait une forte odeur de compost.
Andréas ne s'était pas rendormi et l'observait en silence. Elle l'ignora royalement, enlèva précautionneusement ses vêtements et se mit sous la douche pour s'évanouir.
Immédiatement, Aerie s'éveilla et poussa un petit cri. Que faisait-elle dans la douche, nue?

"Euh, Andréas, j'aimerais volontiers des explications si tu en as!"

Après avoir écouté ce qu'il avait à dire, elle se releva avec peine et se rendit compte que si elle pouvait maintenant se mouvoir plus librement, la fée ne pouvait en aucun cas se tortiller dans tous les sens pour se laver. Il fallait donc... l'aide d'Andréas.

Après un moment encore plus gênant qu'auparavant (Aerie était tombée à genoux face à Andréas pendant le lavage), Aerie alla s'allonger en sous-vêtements sur le lit de l'humain. Elle se tourna vers lui lorsqu'il entra dans la pièce et lui demanda, pensive :

"Est-ce que tu penses que quelqu'un voudrait de moi dans cet état? Je veux dire, avec Lotus."

Elle appréciait évidemment la compagnie d'Andréas, mais elle n'aurait pas été contre une vrai relation, pour ne pas finir toute seule.

Ou presque.

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Aerie écouta Andréas mais ne dit mot. Elle était concentrée dans ses pensées et se demandait si elle avait déjà rencontré celle qu'elle aimerait. Elle avait évidemment une idée, mais elle savait également qu'elle était trop dangereuse pour lui.
Elle se laissa bercer contre Andréas, sentant la fatigue la gagner progressivement.
La fée n'avait cependant pas spécialement envie de dormir, la menace de Lotus trop présente dans les airs. Elle n'avait pas envie de blesser l'humain qui était si gentil avec elle.
Humain qui d'ailleurs s'endormit assez rapidement sans pour autant rompre l'étreinte affectueuse entre eux deux.

Si elle voulait ne pas s'endormir, il fallait d'abord qu'elle bouge.
Aerie s'extraya du lit sans faire un bruit, remplaçant son corps par un coussin dans les bras d'Andréas. Elle interrompit sa marche en direction de la sortie quelques secondes pour rigoler silencieusement devant le tableau que lui dépeignait celui-ci. Puis, rompant son hilarité, elle sortit en katimini de la pièce et se dirigea en direction du canapé qui avait l'air carrément confortable et lui permettrait d'éviter de s'effondrer de douleur.
Une fois assise, elle promena son regard dans la pièce et celui-ci se posa sur une pile de manuscrits sur une table bordée de tasses de café empilées.

Elle se leva précautionneusement du canapé et se traîna en direction de la table. S'asseyant sur la chaise où se plaçait normalement Andréas, elle s'imagina rédactrice.
Mais que pourrait-elle rédiger? Les nouvelles du village? Tantôt d'un ennui mortel, tantôt sanglantes à souhait. Non. La biographie de quelqu'un? Ce qu'elle pensait d'I... Non, il valait clairement mieux qu'elle ne soit pas rédactrice. Aerie essaya de lire ce qui était écrit sur la feuille devant elle, mais l'écriture d'Andréas était trop particulière pour elle.
Avec un soupir, elle se releva un peu trop vite et se cassa la figure dans un boucan de tous les diables. La fée n'arrivait maintenant plus à bouger et était dans une position plutôt ridicule : la tête la première, le menton et les genoux sur le sol tandis que ses fesses étaient relevées.
Andréas apparut rapidement avec un air d'abord inquiet puis hilare pendant tout le chemin qui la ramena à la chambre. Tout deux s'endormirent rapidement et Lotus ne se manifesta pour une fois pas.

Le lendemain, alors qu'ils déjeunaient tous les deux, la fée se tourna vers Andréas et lui dit directement :

"Andréas, tu penses que tu pourrais me donner l'adresse d'Amara? J'ai hum... peur d'avoir été touché par le nuage moi aussi et j'ai besoin de son avis sur la chose."

Le tout dit avec un sourire contrit.