Méfiance quand tu nous tiens.

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Méfiance quand tu nous tiens

Zaïna & Kieran

Enchanté, petite vampire...

Le crépuscule. Un court instant où le jour cède sa place à la nuit, où la lumière cède sa place aux ténèbres. Je me souviens encore des couchers de soleil que j’observais avec mon père tout en haut de la falaise de mon enfance. Et même si l’Ecosse ne demeurait pas le pays le plus ensoleillé du monde, il n’empêchait que l’astre brillant pointait tout de même le bout de son nez de temps en temps. Seulement ici, à Moonlight Falls, apercevoir ne serait-ce que le moindre petit rayon lumineux relevait presque du miracle. En effet, la ville semblait plongée dans une perpétuelle obscurité. Caractérisé par un temps brumeux et pluvieux, elle restait sans aucun doute un parfait terrain de jeu pour les vampires. Toujours est-il que j’appréciais malgré tout regarder le cycle solaire suivre son cours, d’autant plus que de mon balcon je pouvais aisément contempler la lune se refléter dans le lac alimenter par des chutes. J’adorais cet endroit. L’eau y était saine et pure ainsi que colorée d’un bleu limpide qui laissait entrevoir parfois quelques espèces rares de poisson ou animaux en tout genre. Et quelques fois, si vous aviez de la chance, une sirène se laisserait voir sous sa forme originelle.

Tandis que je m’imaginais déjà dans l’eau. J’entrevis au loin une jeune femme s’allonger tout au bord de l’étendue bleue. Elle me parut si paisible que j’eus la soudaine envie de la rejoindre. Il est vrai que j’ignorais encore à quelle race elle appartenait, mais la curiosité est un trait de caractère commun à tous les individus de mon espèce. Et de toute manière je voulais y aller depuis ce matin. Alors je quittai le balcon et me dirigeai à la hâte dans le salon. Je craignais qu’elle ne parte si je ne dépêchais pas. Arrivé dans la pièce à vivre, je ne pris pas la peine de descendre les quelques marches qui donnaient accès à mon large puits personnel et préférai plonger directement dans l’eau. La transformation s’opéra quasi instantanément. Seule la première métamorphose dure longtemps. Une fine membrane se forma autour de mes doigts, tel Harry après avoir avaler la branchiflore. Mes jambes cédèrent leur place à une longue queue recouverte d’écailles de toutes les nuances de gris. Des plus claires au plus foncée. J’aimais la couleur de ma queue parce qu’elle brillait de millier d’éclats. A présent que je pouvais m’approcher de la jeune femme sans qu’elle ne puisse me remarquer, je m’enfonçai dans les profondeurs de ma grotte souterraine et rejoignis les chutes en nageant.
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Bien qu’il faisse sombre, je savais qu’elle avait plongé sa main dans l’eau fraîche. Parfois quelques poissons de tailles plus ou moins variables s’approchaient sans jamais la toucher. Doté de la capacité de respirer ainsi que de garder les yeux parfaitement ouvert en milieu liquide, je ne me privais pas de la détailler. Des cheveux longs et blonds, un teint particulièrement pâle, ainsi qu’un tatouage reconnaissable entre tous. Oh alors comme ça tu es une vampire. J’avais appris à les reconnaître comme toutes les autres espèces d’ailleurs. D’autant plus que Dante m’avait souvent expliqué les caractéristiques qui nous différenciaient les uns des autres. Par conséquent, il n’y avait pas de doutes possibles. Il s’agissait d’une vampire et cela m’importait peu. Je n’effectuais aucune discrimination raciale et considérais les personnes de la même manière. Aussi, ce fut tout naturellement que je sortis la tête de l’eau afin de rencontrer cette inconnue. Le bruit qu’engendra mon mouvement lui suffit à se rendre compte de ma présence. Elle se releva et retira vivement sa main de l’eau. Puis, une fois la surprise passée, elle me lança un regard empli de ce que j’identifiais comme de la méfiance. Pourquoi ? Rien ne me valait un tel ressentiment, ou du moins, par pour l’instant.

« Pourquoi as-tu enlevé ta main. Tu avais peur que je t’emmène dans les abysses ? » ironisais-je. Je devais avouer que l’idée s’avérait extrêmement tentante. Seulement, je n’en ferai rien, je savais me tenir quand même. ► BAUDELAIRE

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Question d'étiquette

Ma première réaction fut de rire à m’en décoller les poumons. Son insinuation concernant mon éventuelle incapacité à l’entrainer au fond de l’eau m’avait réellement amusé. Certes, je savais les vampires extrêmement vifs et réactifs, seulement ici, le milieu se voulait plus avantageux pour les sirènes que pour les vampires. Après tout, La Route De La Jetée constituait le meilleur refuge pour espèce, et uniquement mon espèce. A croire que Moonlight Falls était construite pour les êtres surnaturels. De toute manière, si je ne m’étais pas dévoilé à la jeune femme, il m’aurait été tout à fait facile d’attraper sa main, qui serait alors restée immergée. D’autant plus que ma puissante queue me permettait de nager à une vitesse défiant les limites du réel pour un être pour moitié humanoïde. Toutefois, tel n’avait pas été le cas. Ce genre d’opportunité attirait incommensurablement mon peule. Néanmoins, j’avais appris à résister à la tentation de couler les individus en contact avec ce liquide vital à ma race.

A présent que la vampire se tenait bien droite, je pus la détailler à loisir. De taille normale, mince et à la silhouette élancée elle demeurait tout à fait agréable à regarder, bien que son teint soit un peu trop pâle à mon goût. Mais ses yeux me frappèrent le plus. D’un bleu turquoise si intense qu’on les croirait tout droit sortis de la mer des Caraïbes. Ses miroirs de l’âme et sa cascade dorée donnaient un peu de… vie à son visage. Pourtant son expression paraissait rongée par la méfiance. Aucun sourire ne se dessinait sur ses lèvres. Elle n’appréciait visiblement pas les autres races. Mais je supposais qu’elle n’aimait pas non plus sa condition de buveuse de sang. Le regard de l’inconnue se posa quelques secondes sur ma queue. Le bas de mon corps semblait la perturber, ou du moins, la rendait perplexe. A quoi penses-tu ? Soudain, elle se rapprocha du bord et étudia les alentours. Elle se demandait vraiment beaucoup de choses. Ce devait être l’une des premières fois qu’elle s’aventurait dans le quartier des sirènes. Je le voyais à son malaise. La situation m’amusait énormément. Je ne cessais de sourire bêtement, au risque de passé pour un simplet. Ma jolie rencontre demeurait perturbée. Elle plaça sa main sur son tatouage en forme de V afin de le dissimuler.

Je ne compris pas pourquoi sa marque aurait dû me dissuader de venir. Peu m'importait sa race, sa couleur de peau, son sexe. Pour moi il s'agissait d'un individu pourvu de sa propre opinion, de ses propres idées ainsi que de son propre caractère. J'aurais agit de la même manière avec un sorcier ou un loup. Je plongeai et m'avançai au plus prêt du sol terrestre. Puis je sortis la moitié de mon corps ̶ la partie "humaine" ̶ en dehors de l'eau purificatrice du lac. « Pourquoi me méfierais-je de toi ? Tu te trouves dans un environnement qui m'est familier en tout point. » commençais-je le visage illuminé. Je ne risquais absolument rien. Je savais qu'elle n'avait pas l'intention de m'attaquer et qu'en réalité j'étais celui qui avait perturbé son moment de sérénité. Cet endroit ne m'appartenait pas mais les vampires se montraient très rarement en ses lieux. La soif de curiosité m'avait conduit jusque elle, et elle ne s'était toujours pas apaisée. Son visage tiraillé par la haine de sa condition de vampire et par les préjugés qu'elle éprouvait pour les autres espèces s'avérait très intéressant et divertissant pour un bon vivant tel que moi.

« Tu n'as pas l'intention de me mordre, quand même ? Si tel n'est pas le cas, aurais-tu l'amabilité de me donner un nom à mettre sur ce joli minois. Ou si tu préfères, je peux me présenter en premier, mais après tout, ne dit-on pas honneur aux dames ? » finis-je en tenant ma main dans sa direction. Je n'avais nulle intention de la noyer, mais les convenances ne disaient-elles pas qu'un gentleman se devait de baiser la main des ladies ? ► KIERAN

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Bien entendu, je savais qu’elle ne planterait pas ses crocs dans ma gorge. Mais l’humour participait sans aucun doute à détendre une atmosphère trop pesante à mon goût. Et même si sa confirmation s’avérait inutile, je ressentis malgré tout une sorte de soulagement. J’appartenais aux rares personnes qui se vantaient de ne s’effrayer quasiment jamais en présence de n’importe quelle espèce surnaturelle. Seulement, on n’est jamais trop prudent. Je connaissais le tempérament des vampires. Et malgré tout, la jeune femme m’inspirait moins confiance qu’un membre de sa race à l’âge avancer. Les vampires ne s’acceptant pas en tant que tel demeuraient les plus imprévisibles et les plus dangereux aussi. Pourtant, je n’ignorais pas au fond de moi, qu’elle ne ferait rien contre ma personne, elle semblait bien trop préoccupée par ses propres problèmes qu’elle ne voulait sans doute pas s’en créer de nouveaux.
Toutefois, malgré l’assurance sans faille qu’elle se donnait, la jeune buveuse de sang se vit rétissante quant à me serrer la main. Il est vrai que je me trouvais toujours entouré de mon milieu de prédilection. Alors je pouvais comprendre sa réaction. Même si mon but se voulait d’être purement et simplement de faire œuvre de politesse et de gentillesse. Sans aucune arrière-pensée. D’autant plus que je ne me considérais pas comme un être maléfique, ou du moins, on me pensait facilement plus inoffensif qu’un loup ou qu’un vampire. Uniquement en apparence. Cependant, je n’étais jamais, ou presque, celui qui entamait les hostilités. Et bien que ma condition de triton me confère une irrévocable envie d’attirer les jeunes femmes, ou même les jeunes hommes, dans les abysses, je contrôlais parfaitement mes désirs.

« Je te donne mon prénom, mais tu oublies l'idée de me prendre la main, au cas ou l'idée de m'entraîner dans l'eau te passerait par la tête. En plus je ne te connais pas. » annonça-t-elle en levant les yeux au ciel. Il me sembla alors que la belle blonde aux yeux couleur des caraïbes s’exaspérait d’elle-même.

Ainsi donc, elle acceptait malgré tout d’accéder à ma demande : un nom. Je pourrai enfin cesser de l’appeler la jeune femme, ou la vampire ou encore la jolie blonde. Pourvoir enfin connaître la personne en face de moi éveilla en mon être un sentiment inconditionnel de satisfaction. Visiblement, ma présence semblait de moins en moins l’agacer. Et déjà son visage dévoilait de multiples expressions encore absentes quelques minutes auparavant. Tandis que nous parlions, je percevais le peu de rayons qui filtraient à travers les nuages il y a peu, diminuer considérablement en nombre. Et déjà le perpétuel brouillard caractéristique de la ville s’installait sur l’ensemble de Moonlight Falls. « Oh tu me vexerais presque. Mais soit. On oublie les bonnes manières et je ferai en sorte de respecter une certaine distance de sécurité, aussi bien pour toi que pour moi. » commençais-je sans me départir de mon sourire un tantinet ravageur. Enfin, c’est ce que les femmes me rapportent. « Et c’est bien parce que nous ne nous connaissons pas que j’aimerai connaître ton prénom. J’ai toujours aimé faire de nouvelles rencontres. Qu’elle soit bonne ou… moins bonne. Alors je t’en prie, dis-moi le nom que tu portes, j’en suis sûr, à merveille. » Chassez le naturel et il revient au grand galop. Je n’avais pu m’empêcher de la charmer alors que je connaissais très bien son humeur actuelle. La démagogie dont les sirènes semblaient pourvue avant même leur naissance, s’avérait une arme redoutable ainsi qu’un don indéniable, mais aussi une malédiction dans certaine situation comme celle que je vivais à cet instant.

« Je m’appelle Zaïna Vitali. » déclara-t-elle. Zaïna paraissait peinée. Vraisemblablement, il s’agissait d’un grand pas pour elle. Je ne l’imaginais pas se confier à beaucoup de monde. Je la percevais plus comme une solitaire. Zaïna m’apparaissait comme mon contraire. Mais ne dit-on pas que les opposés s’attirent ? Bien sûr je n’en parlais pas sur le plan charnel de l’expression, mais pourquoi ne pas créer un lien avec une jeune femme pour le moins différente de moi. Pour l’heure cependant, il fallait juste éviter de l’irrité et partir sur de bon termes. « Vitali… Ainsi donc, tu es la cousine de Velcan et la meilleure amie d’Amara aussi il me semble. Je savais que tu existais, mais je peux enfin mettre un visage sur ton nom. » Amara m’avait parfois parlé d’elle et elle ressemblait tout à fait ce à quoi je l’avais imaginé. Sauf peut-être ses magnifiques yeux bleus. « Enchanté Zaïna. Et bienvenue aux chutes d’eau ! » finis-je. Je me surpris à penser la laisser seule. Après tout, les chutes demeuraient l’endroit parfait pour s’évader. Moi-même je venais ici afin de me ressourcer, de me vider l’esprit, de m’évader. « Eh bien ravie d’avoir pu enfin te rencontrer. Je vais te laisser retourner à tes pensées. » dis-je finalement. Evidemment, je me gardais bien de lui clamer haut et fort que je resterais quelques temps sous l’eau sans qu’elle se doute de ma présence. J’ignorais pourquoi, mais ce vampire animait une importante curiosité en moi. ► KIERAN

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Je pensais sincèrement que je la dérangeais, bien qu’elle semblait déjà plus réceptive que quelques minutes auparavant. Zaïna m’avait livré son prénom ainsi que son nom, ce qui d’après mes observations, se voulait être un grand pas pour la jeune vampire. C’est pourquoi je choisis de plonger et d’immerger la totalité de mon corps avant même qu’elle ne prononce mots. Toutefois, ma condition de sirène me conférait certaines facultés non sans importance. Mon ouïe ainsi que ma vue se trouvait décupler dans les milieux humides. Aussi, je l’entendis, malgré les litres d’eau qui nous séparaient, me demander d’où je connaissais Amara et Velcan, son cousin. Il m’aurait été extrêmement simple de lui expliquer les liens que j’entretenais avec l’une des jumelles Morganthe. Cependant, la question de Velcan demeurait quelque peu compliquée et secrète. Personne ne devait connaître le genre de relation que nous possédions lui et moi. D’une part parce que cela serait mal vue et d’autre part parce que je savais que le vampire formait déjà un couple avec un autre citoyen de Moonlight Falls. Néanmoins, je décidais d’éclairer la lanterne de Zaïna. Après tout, elle méritait bien quelques explications, j’omettrai juste certains détails qui ne regardaient que moi.

Alors que je commençais une nouvelle fois une ascension dans la direction de la jolie blonde, je perçus très clairement une nouvelle question. Mon identité. Elle la voulait. Je lui devais. De toute manière j’avais faussé dès le début. Dans le code de la galanterie, il était de bon usage que le jeune homme se présente avant sa dame. Seulement, j’adorais jouer. D’autant plus qu’il y a toujours du bon à laisser planer un peu de mystère. J’avais juste oublié de décliner mon identité avant de mettre les voiles. L’image de la jeune femme à travers l’eau commença soudainement à s’effacer. Quelques minutes auparavant, elle se trouvait assise au même endroit qu’à notre première rencontre. Elle s’en allait. J’avais pris trop de temps à réfléchir et à cogiter sur des sujets qui ne la concernait pas. J’accélérai alors ma montée et finis par me propulser entièrement hors de l’eau, emporté par mon élan. Je me retrouvais alors assis sur le bord où Zaïna se reposait calmement. Ma queue touchait à peine le lac. Je ne tarderai pas redevenir humain. L’air terrestre s’avérait frais et la brise légère accentuait cet effet. Cependant, je ne craignais pas le froid. Je me sentais bien.

Zaïna avançait lentement. Je pus alors aisément répondre à toutes ses questions en restant absolument certain qu’elle m’écoutait. « Amara est la sœur de mon meilleur ami, Dante. Et j’ai eu l’occasion de vivre au sein de la famille Morganthe quelques semaines lors de mon arrivée… ici. » débutais-je. L’heure n’était pas encore assez avancée pour qu’elle parte ainsi. J’ignorais pourquoi, mais je tenais à créer un lien avec la jeune femme. Son côté impénétrable éveillait en moi une curiosité sans pareil. Et Dieu sait à quel point je le suis. « Quant à Velcan, disons… qu’il nous est arrivé de nous croiser parfois. » Elle ne devait en aucun cas se douter de quelque chose. Aussi j’évitais de penser à son cousin. Je connaissais la capacité de télépathie dont les vampires se montraient dotés. Je n’allais pas la laisser découvrir mon secret si facilement. Pour son propre bien, pour celui de Velcan et pour le mien. « Oh, et tu as raison, je manque à tous mes devoirs. Je m’appelle Kieran Elwyn Carnegie. 24 ans. Triton et vétérinaire à mes heures perdues. » finis-je avec une pointe d’humour. Je n’avais plus qu’à croiser les doigts pour qu’elle se retourne et revienne sur ces pas. Je voulais en savoir plus sur elle. Mais bien sûr, tout dépendait de son choix. Seulement ne savais que qu’il soit, nous nous reverrions un jour ou l’autre. ► KIERAN

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